« OLYMPE, UNE FEMME DANS LA RÉVOLUTION », EN PRIME SUR FRANCE 2
Diffusé sur France 2 en mars, le premier téléfilm produit par MSVP pour France 2, réalisé par Julie Gayet et Mathieu Busson, s’est tourné à l’automne 2023, en région Occitanie. On a pu le voir à Angoulême (Festival du film francophone), à La Rochelle (festival de la fiction), à Pessac (Festival international du film d’Histoire) et à Plaisance-du-touch (festival international de fiction historique).
Synopsis
Paris, juillet 1793. La situation est explosive et la Terreur bat son plein. Au milieu de ce monde de violences et de mutations, une seule constante : les femmes n’ont le droit à rien. Olympe de Gouges est l’une des rares à oser s’élever contre cette injustice. Femme de lettres, femme de combats, Olympe s’oppose frontalement à Robespierre. Arrêtée par la police d’État, elle attend son procès, enfermée dans une maison d’arrêt. Au milieu des autres condamnées, Olympe va continuer de lutter.
Entretien avec Julie Gayet et Mathieu Busson
Parlez-nous de votre « parité créative »
Depuis 2016, nous cocréons ensemble. Trois documentaires d’abord pour Ciné+, un livre ensuite édité chez Stock, et aujourd’hui, une fiction pour France 2. Au centre de notre travail, la place des femmes dans un monde d’hommes.
Réaliser à deux, ce n’est pas rien, mais une fois pesées les difficultés, il y a surtout une force folle, celle de la complémentarité. Mieux, nous concernant, il y a la parité, à laquelle nous tenons mordicus.
Lors de notre premier documentaire en 2012, nous sommes revenus sur la figure d’Alice Guy, alors oubliée, et pourtant première personne à avoir réalisé des films de fiction. Ce portrait d’Olympe de Gouges, c’est un autre (petit) pavé que nous jetons dans la mare, une manière de rendre ses lettres de noblesse à cette figure si importante. Et, surtout, de donner envie aux téléspectateurs et téléspectatrices de découvrir tous ses autres combats. Après Olympe, c’est Louise Michel que nous aimerions faire revivre… affaire à suivre !
Pourquoi Olympe de Gouges ?
Julie Gayet
Le personnage d’Olympe se résume pour le peu qui la connaissent, à la « Déclaration des droits des femmes », mais c’est avant tout une grande humaniste, très empathique et une visionnaire. Elle est aujourd’hui étudiée en première au bac français, mais ma génération la connaît bien moins que celle d’aujourd’hui. Elle était plus étudiée en Allemagne, en Angleterre, aux Etats-Unis, qu’en France. On a voulu la décrédibiliser de son vivant car elle gênait...
J’espère que ce film donnera envie d’aller plus loin, de lire ce qu’elle a écrit, de la découvrir dans tous ses combats... Elle s'est par exemple battue pour la création d’hospices pour les vieillards, d'ateliers pour les chômeurs, pour la mise en place d'un impôt sur le luxe en faveur des plus démunis ou encore pour la création d'une caisse patriotique. Elle était incroyable ! Sur la vie des femmes, elle veillait sans cesse et luttait pour les remettre à leur juste place : contre leur enfermement, le mariage forcé et l'impossibilité du divorce. Certains de ses décrets sont passés d’ailleurs lors de la Révolution française.
Mathieu Busson
Il y a des personnalités qu’aucun n’attend mais qui, par leur caractère, leur intelligence et leurs idées, forcent les portes de l’Histoire. Parmi ces individus qui bousculent les consciences et la norme, certains vont tellement trop vite, tellement trop loin, que l’on semble préférer les effacer pendant des décennies. Il est des femmes qui ont osé s’aventurer sur des terrains réservés aux hommes, pour qu’il n’y ait plus de terrain du tout. Olympe de Gouges appartient à toutes ces catégories.
Issue d’une bourgeoisie modeste, quasi illettrée, elle s’est hissée par sa seule volonté, jusqu’à faire entendre sa voix et défendre toutes les formes d’égalité : entre blancs et noirs, entre riches et pauvres, entre hommes et femmes. Plus de deux siècles avant #Meetoo. Pour cela, notamment, elle a fini sous la guillotine et sous… les livres d’Histoire.
Depuis quelques temps, on la cite, enfin, à nouveau, et c’est tant mieux. Mais ce n’est pas assez, et il apparait évident que son courage et ses audaces valent largement un film. Non pas en forme d’hommage ampoulé et scolaire, mais dans le cadre d’une fiction accessible à toutes et tous. Vivante, collée aux entrailles, palpitante. C’est ce qu’on a essayé de faire : un film sur une femme qui a initié une révolution au sein même de la Révolution. Enflammé, libre et moderne. À son image.
Entretien avec Christie Molia, productrice
Faire un film sur Olympe, une mission de service public ?
C’est sûr, il n’y avait que France Télévisions pour accompagner un tel projet. On est chanceux de les avoir à nos côtés, ils portent le film avec nous depuis 3 ans maintenant, et ce n’est pas terminé. On réfléchit, en plus de la diffusion tv, à un partenariat avec Lumni, la plateforme de France Télévisions dédiée aux contenus pédagogiques.
Il y a également une novelisation du scénario par 2 historiennes qui est en cours, éditée par Flammarion. Le but est de rendre accessible au plus grand nombre ce portrait d'une femme extraordinaire.
Quelles ont été vos contraintes pour produire un film en costumes ?
Les films en costumes coûtent plus chers à produire, c’est un fait. Il y a des dépenses incompressibles : une intrigue qui se déroule en 1789 demande des repérages de lieux très spécifiques, des coiffures et perruques particulières, une réflexion autour des costumes (et parfois même de la création, ce qui n’a pas été le cas ici). Nous avons eu des journées de tournage à plus de 200 personnes sur le plateau, lorsque certaines scènes nécessitaient la présence de nombreux.ses figurant.e.s. Certains décors ont dû être créés à partir de rien, c’était beaucoup de boulot !
On doit beaucoup à nos supers cheffes de poste Valérie Valero (cheffe déco), Sandrine Bernard (cheffe costumière), Véronique Pflüger (cheffe perruquière) et Laurence Grosjean (cheffe maquilleuse) pour l’atmosphère qu’elles ont su rendre. Sans parler du talent du chef op Antoine Monod et sa super équipe d’électrostatiques et machinos pour sublimer tout cela.
C’est au total plus de 450 personnes qui ont travaillé sur le film depuis l’écriture, ça en fait du beau monde…mais toute l'équipe a su relever ce pari un peu fou !
Quel est l’ancrage régional du film ?
On a tourné le film en Occitanie, dans le Gers, le Tarn-et-Garonne, l’Aveyron et à Toulouse. Il faut dire qu’Olympe est née à Montauban, donc ça faisait plus que sens pour nous ! Et comme un juste retour des choses, on organise avec Occitanie Films de nombreuses projections du film dans les cinémas devant un public de scolaires mais aussi directement dans les collèges, suivies d’échanges avec Julie Gayet et Mathieu Busson. Ces moments sont très forts à vivre, on a fait ce film pour ça, pour eux, pour que les nouvelles générations puissent s’emparer de ces grandes figures du féminisme et de notre Histoire, trop souvent oubliées.