La réponse de l’autre primé au festival du film social 2021

Manon Salmon, étudiante en Master 1 Écritures documentaire recherche et création, à l’Université Aix-Marseille, a remporté en mai 2019 la bourse Graine de doc et a pu tourner son premier film entre septembre 2019 et mars 2020. Le montage s'est terminé fin mai 2020.

Le film a obtenu en octobre 2021 le prix Solidarités de la ville de Nice, dans le cadre du festival du film social de Nice.

Dans La réponse de l'Autre, Manon Salmon propose un documentaire inspirant sur un lieu de vie pour adolescents dits « incasables ». Elle s’intéresse à ceux qui ont choisi de se vouer à ce lieu de vie, éducateurs, psychologue ou aidants venus apporter là leur envie de s'inspirer de Freud ou Dolto pour créer un lieu unique, expérimental. Le film raconte aussi le parcours de deux adolescents et la manière dont ils vivent ce lieu.

Elle-même passée par ce métier d’éducatrice spécialisée, désireuse de devenir réalisatrice, Manon fait un premier pas concret dans ce métier à travers ce premier film, que TSVP a accompagné grâce à l’engagement de Public-Sénat.

Sur des images de Florent Giffard, porté par la musique électronique de RRobin, son film avait été à salué par la critique lors de sa diffusion.

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Manon Salmon, 2019
Manon Salmon, 2019

Interview de Manon Salmon- Réalisatrice lauréate du concours Graine de doc 2019-2020

 

Quel était votre projet ? Pourquoi avez-vous voulu traiter ce sujet ? Que vouliez-vous montrer ?

Je souhaitais témoigner de la singularité du lieu de vie des quatre chemins, qui porte un idéal à deux niveaux : celui d’une organisation démocratique horizontale, et celui d’une prise en charge alternative pour des adolescents en grande difficulté. Il m’importait de mettre en relief les questionnements de l’équipe pluri-professionnelle sur leur pratique autant que la manière dont les jeunes se saisissaient ou non des accompagnements. En tant qu’éducatrice spécialisée j’ai pris conscience des mutations à l’oeuvre dans le secteur social : uniformisation des pratiques et primauté d’une logique quantitative au détriment de la qualité du lien dans l’accompagnement éducatif. En faisant le choix de me ré-orienter dans le cinéma documentaire, je voulais privilégier celles et ceux qui tentent d’innover, pour réfléchir avec eux, aux possibilités et limites de leurs propositions.

Comment le tournage s’est-il passé ? Comment avez-vous réussi à aborder ces jeunes ?

J’ai poussé la porte du lieu de vie, un mois seulement après son ouverture, j’ai très vite été intégrée, non pas comme une éducatrice mais davantage comme une intervenante à la caméra (cf. Mariana Otéro - « A ciel ouvert »). Quand mon caméraman et ami, Florent Giffard, a intégré les tournages, la voie était donc déjà ouverte. Sa discrétion et sa sensibilité nous ont permis d’assurer les tournages en bénéficiant de la confiance de tous. Cependant, le contexte de réalisation restait difficile pour un premier film, nécessitant immersion et réactivité pour répondre aux enjeux du cinéma direct.

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Interview de Hélène Risser- Responsable du pôle documentaire à Public Sénat

Quels étaient les critères de sélection des projets ? À quoi avez-vous été sensible ?

Le principal critère est la ligne éditoriale de Public Sénat. Nous voulons des projets qui questionnent la société et le rapport des jeunes à celle-ci. Aussi les thématiques du concours sont celles de l’engagement et de la participation. Nous avons reçu de nombreux projets, originaux et intéressants, ce qui a été un succès et une joie pour cette première édition de Graine de doc. Ensuite, nous nous sommes attachés à comprendre le lien des candidats avec leur sujet et la singularité de leur approche. En effet, dans un documentaire, le point de vue du réalisateur est essentiel. Nous avons été sensibles à la démarche de Manon, ancienne éducatrice désireuse de filmer un foyer accueillant des jeunes, en s’intéressant à ceux-ci, mais aussi au personnel, psy et éducateurs, qui tentent de leur montrer qu’un nouveau chemin de vie est possible.

Du projet initial présenté à la réalisation, comment ce documentaire a-t-il évolué ?

Le projet présenté par Manon est très proche du film achevé. On sentait bien, dès le début, le désir de s’immerger dans le quotidien de cette maison d’accueil, avec ses règles, ses joies et ses conflits. Au fil des saisons, on voit les jeunes évoluer, rechuter aussi, parfois, et les éducateurs parfois découragés, qui se concertent et inventent des réponses pour sortir ces jeunes de l’ornière. La place de la réalisatrice, en revanche restait en suspens. Nous voulions que la singularité de son point de vue d’ancienne éducatrice apparaisse. Elle a choisi de l’incarner à travers une voix off, celle d’un éducateur, narrateur de l’histoire qui lui donne sa singularité. Un film sur les doutes et le combat de ceux qui aident ces jeunes, plus qu’un film sur ces jeunes.